Syngue Sabour : Pierre de Patience ***
En Afghanistan, une femme veille son mari dans le coma depuis plusieurs jours alors que les combats grondent à l’extérieur. Après avoir mis ses enfants à l’abri chez sa tante, elle revient prendre soin de son époux et lui confie ses pensées et souvenirs… Elle fait de lui sa « Syngue Sabour », sa pierre de patience. Une pierre magique qui selon la mythologie persane, éclate une fois qu’on lui a confié tous nos malheurs et secrets.
En 2003, Atiq Rahimi avait déjà transposé à l’écran un de ses romans avec le film Terres et cendres. Cette fois, il adapte avec l’aide du scénariste Jean-Claude Carrière son premier roman écrit directement en français et lauréat du Prix Goncourt en 2008, Syngue Sabour : Pierre de Patience. A partir de la légende perse, l’écrivain-cinéaste signe un très beau film sur une femme qui par la parole s’émancipe de l’emprise de son mari. L’occasion pour elle de (re)découvrir son corps mais surtout une liberté à laquelle elle n’a jamais vraiment goûté jusqu’ici. Dans la peau de cette femme, Golshifteh Farahani captive le spectateur par sa luminosité et ses monologues édifiants en forme de confessions. L’actrice se fait la voix d’une liberté rêvée par toutes les femmes contraintes. Une intrigue qui fait étrangement écho à sa propre histoire.
Née en Iran le 10 juillet 1983, Golshifteh Farahani est la fille du célèbre réalisateur iranien Behzad Farahani. Elle tourne dans son premier film à l’âge de 14 ans pour ne plus s’arrêter. Elle enchaîne près d’une vingtaine de films en 10 ans et devient une véritable star dans son pays. En 2007, elle est la première actrice depuis la révolution islamique de 1979 à tourner à Hollywood. Une expérience que l’Iran ne lui pardonnera pas. Alors qu’elle vient de terminer le tournage de Mensonges d’Etat de Ridley Scott aux côtés de Leonardo Dicaprio, les autorités iraniennes lui retirent son passeport et l’empêche de quitter le territoire pour s’être montré sans voile à l’avant-première du film. Golshifteh parvient à fuir l’Iran pour la France où elle rejoint son mari Amin Mahdavi (on l’a dit désormais avec Louis Garrel sous la direction duquel elle a tourné le court-métrage La Règle de trois).
A partir de son arrivée dans l’hexagone, elle n’a plus remis les pieds dans son pays natal qui l’a depuis bannie pour être apparue dénudée dans le magazine Madame Figaro. Ainsi que dans la vidéo réalisée par le photographe Jean-Baptiste Mondino réunissant les artistes pressentis aux nominations des Césars du Meilleurs espoirs masculin et féminins de 2012.
Tout cette controverse pour finalement ne pas même être nommée… Si cela avait été le cas, elle l’aurait été pour Poulet aux prunes de Marjane Satrapi, autre artiste iranienne expatriée bien connue (en 2007, elle signait l’autobiographique Persepolis). Sinon on a pu voir Golshifteh dans A Propos d’Elly du réalisateur iranien Asghar Farhadi en 2009 ou encore dans Just Like A Woman, le téléfilm de Rachid Bouchareb avec Sienna Miller diffusé sur Arte en décembre dernier.
On a envie de dire « merci » à L’Iran pour ce beau cadeau. Golshifteh Farahani et sa beauté irréelle vont pouvoir continuer à éblouir le cinéma français.
Titre original : Syngue sabour
Sortie : 20 février 2012
De : Atiq Rahimi
Avec : Golshifteh Farahani, Hamidreza Javdan, Hassina Burgan, Massi Mrowat…
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