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Dans le Sud des Etats-Unis en 1858, le chasseur de primes Dr King Schultz fait l’acquisition de Django, un esclave qui pourrait l’aider à identifier trois criminels qu’il recherche. En échange, Schultz lui promet de l’affranchir et de l’aider à libérer sa femme Broomhilda, esclave à la plantation Candyland.
6 raisons d’aller voir Django !
1. Le virage à 180 degrés de Christoph Waltz
Après avoir campé un nazi chasseur de juifs dans Inglourious Basterds, Christoph Waltz incarne ici un chasseur de primes. Pour son second film sous la direction de Quentin Tarantino, l’acteur allemand interprète toute en subtilité l’Europe des lumières, le sage ouvert d’esprit. Un virage à 180 degrés qui lui vaut une seconde nomination aux Oscars (il a déjà remporté le Golden Globe du meilleur acteur dans un second rôle). Une nouvelle consécration méritée même si on a bien du mal à comprendre pourquoi il est le seul acteur du film à recevoir tant de louanges. Certains disent qu’il pique la vedette à tous ses partenaires. A vrai dire, on n’a d’yeux que pour Jamie Foxx.
2. Jamie Foxx, le cow-boy le plus cool de l’Ouest
Avant que le rôle de Django ne revienne à Jamie Foxx, Will Smith, Idris Elba, Chris Tucker ont entre autre été pressentis. Impossible pourtant d’imaginer un autre acteur dans la peau de l’esclave affranchi. Outré par l’absence de Leo aux Oscars, on en avait oublié que Jamie Foxx avait également été oublié. Et l’injustice qui lui faite est plus scandaleuse encore. Aussi attachant que déterminé, Django est certainement le personnage le plus cool jamais crée par Quentin Tarantino. Et Jamie Foxx incarne à merveille la classe nonchalante de Django, cow-boy vengeur à la gâchette la plus rapide de l’Ouest. On prend un malin plaisir à le voir dézinguer du blanc esclavagiste.
3. Leonardo Dicaprio dans son premier rôle de méchant
Leonardo Dicaprio faillit incarner Hans Landa dans Inglourious Basterds, rôle finalement dévolu à Christoph Waltz avec le succès que l’on connaît. A défaut d’avoir joué le vicieux nazi, il interprète ici le propriétaire de la plantation Candyland (véritable ancienne plantation). Féru de combats d’esclaves, Candie est décrit par Quentin Tarantino comme : « Une sorte de jeune prince flamboyant, un Louis XIV à Versailles ». Un rôle que Leo a déjà joué dans le très moyen L’Homme au masque de fer.
Maudit des remises de prix, l’acteur a de nouveau été snobé par les Oscars. Et quand il ne l’est pas, c’est pour mieux se voir souffler la victoire par ses partenaires de jeu (il était nommé dans la catégorie du meilleur acteur dans un second rôle aux derniers Golden Globes Awards aux côtés de Christoph Waltz qui remporta le prix). Mais si son absence aux Academy Awards était injustifiée en 2007 pour sa prestation dans Les Infiltrés (sa meilleure à ce jour), elle l’est presque cette année. Si l’acteur est irréprochable dans la peau du caricatural négrier, on ne le sent pas totalement à sa place. En fait, on le préfère en gentil dépressif (Les Infiltrés, Shutter Island). Par contre, Samuel L. Jackson excelle dans l’art de jouer les méchants. Il est le plus détestable de tous dans Django Unchained.
4. Pour Stephen, le personnage le plus haïssable de l’univers de Tarantino
La presse américaine n’a pas hésité à qualifier le personnage de Stephen, d’oncle Tom. Aux Etats-Unis, ce nom tiré du livre La case de l’oncle Tom sert d’adjectif pour les noirs trop zélés vis à vis des blancs. Il est tellement connoté péjorativement qu’on n’en oublie que le roman de la fervente abolitionniste Harriet Beecher Stowe est réputé avoir aidé à déclencher la guerre de Sécession. Dans la peau de cet odieux oncle Tom, Samuel L. Jackson marque un grand coup. L’acteur, qui en est déjà à sa cinquième collaboration avec Quentin Tarantino, nous avait surtout marqué dans le rôle de Jules Winnefield (et son sermon biblique) dans Pulp Fiction, mais il trouve dans celui de Stephen son meilleur rôle. Sorte d’intendant de la plantation de Candie, Stephen est dévoué corps et âme à son maître, s’assurant qu’aucun esclave ne transgresse les règles. Bref, on déteste instantanément cet infâme esclavagiste, traître à sa communauté martyrisé mais on adore Jackson, impérial. Attention personnage bientôt culte.
5. Un film faussement polémique
Spike Lee a récemment déclaré sur Twitter : « L’esclavage aux Etats-Unis n’avait rien d’un western spaghetti de Sergio Leone, ça a été un holocauste. Mes ancêtres étaient des esclaves. Volés à l’Afrique ». A noter que le réalisateur n’a pas vu le film, précisant au site du magazine Vice que ce serait irrespectueux envers ses ancêtres d’aller le voir… En même temps, Quentin Tarantino n’a jamais prétendu être un documentariste. Déjà dans Inglourious Basterds, il remaniait l’Histoire pour nous servir du grand divertissement. Tant cinéphage que cinéphile, Tarantino est un faiseur d’histoires qui puise dans l’historique pour faire dans le jouissif. Et du jouissif, Django Unchained n’en manque pas.
Il y a aussi cette autre polémique stérile quant à l’utilisation trop excessive du mot « Nigger » (le N-Word comme disent les Américains) dans le film. Insulte suprême pour la communauté afro-américaine aux Etats-Unis, on veut bien comprendre que certains s’en offusquent mais il suffit simplement de replacer le film dans son contexte historique… Défendu par tous ses acteurs, Tarantino a beau ne pas prendre de gants avec l’Histoire, il ne réinvente pas non plus le contexte de l’époque à laquelle il se place.
Au lieu de critiquer le film, ne vaut-il pas mieux se concentrer sur son héros, le personnage de Django lui-même. Le réalisateur offre à Jamie Foxx, un rôle jusqu’ici réservé aux blancs, celui du héros, celui du cow-boy à la gâchette la plus rapide de l’Ouest. C’est moi ou Django est encore plus classe que John Wayne !
6. Une relecture du western spaghetti référencé
Si Tarantino avait déjà été influencé par le genre Western Spaghetti pour Kill Bill ou Inglourious Basterds le temps de quelques scènes, il lui rend hommage durant tout un film avec Django Unchained. Le réalisateur est allé puiser dans ses films préférés et autres, pour créer ce néo cow-boy. Voici quelques références :
– En plus de reprendre le nom du héros et d’avoir offert un rôle à Franco Nero, interprète du rôle titre du Django de Sergio Corbucci de 1965 (c’est à lui que Django explique comment épeler son prénom), Tarantino en reprend deux compositions : « Django », le main thème du film de Luis Bacalov et Rocky Roberts ou encore « La Corsa » (2e version) de Luis Bacalov.
– Le personnage de Broomhilda Von Shaft aurait un lien avec le héros du film Shaft (Les nuits rouges de Harlem, 1971) qui connut un spin-off en 2000 avec Samuel L. Jackson dans le rôle-titre. Pour Tarantino, Shaft serait en fait un descendant de Django et Broomhilda.
– La première tenue de Django, celle du valet, est directement inspiré du tableau L’enfant bleu du peintre anglais Thomas Gainsborough. Pour sa seconde tenue, celle du cow-boy, Quentin Tarantino a puisé dans la série Bonanza crée en 1959 où Michael Landon (plus connu sous le nom de Charles Ingalls de La petite maison dans la prairie) porte un chapeau cloutée et une veste verte très similaire.
– Durant le film, il est fait référence à une légende allemande dans laquelle un homme prénommé Siegfried fait tout pour sauver une certaine Broomhilda. C’est en partie parce que Django lui rappelle ce héros que le Dr Schultz décide de l’aider à libérer son épouse.
En fait, Tarantino s’est inspiré de Der Ring des Nibelungen, un opéra écrit par Richard Wagner. Dans le quatrième acte de celui-ci, Brunehilde est une valkyrie qui renonce à l’immortalité pour amour pour Siegfried après que ce dernier l’ait sauvé d’un sommeil éternel. Dans la mythologie nordique, c’est tout autre chose. Siegfried aime Kriemhild, la sœur du roi Gunther, roi que Brunehilde est forcée d’épouser. Et ils ne tombent jamais amoureux.
– Fan notoire d’Ennio Morricone, Tarantino a comme pour ses précédents repris quelques unes de ses compositions : « The Braying Mule » (tiré du film Sierra Torride), « Sister Sara’s Theme » (tiré du film Sierra Torride), et « Un Monumento » (tiré du film Les Cruels).
Un défaut : Kerry Washington ?
A l’instar des westerns d’antan, il y a peu de place pour les femmes dans Django Unchained. En même temps, il vaut peut être mieux vu ce qu’un western au féminin peut donner (on se rappelle les médiocres Mort ou vif, déjà avec Leonardo Dicaprio, ou encore Bandidas). Ici Kerry Washington n’est qu’un prétexte pour l’arrivée de Django et Schultz à au pays de Candie. Et si l’actrice est peu présente dans Django Unchained, elle parvient quand même à être la plus mauvaise de la troupe passant 95% de ses scènes à trembler comme une feuille et à attendre que Django sauve ses fesses. C’est agaçant de la voir jouer aussi mal face à quatre partenaires masculins au sommet. On aurait préféré une femme plus revancharde et prête à en découdre. Un peu à l’image de son mari avec qui elle aurait pu former un duo vengeresque. Peut être dans une suite…?
Sortie : 16 janvier 2013
De : Quentin Tarantino
Avec : Jamie Foxx, Christoph Waltz, Leonardo Dicaprio, Samuel L. Jackson, Kerry Washington, Jonah Hill, Don Johnson, Amber Tamblyn, Zoe Bell, James Remar…
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